Jowee Omicil – « Spiritual Healing : Bwa Kayiman Freedom Suite » CeRemonY

Jowee Omicil : vents, voix / Randy Kerber et Jonathan Jurion : Piano / Arnaud Dolmen et Yoann Danier : Percussions / Jendah Manga : Bass

Jowee Omicil, canadien d’origine haïtienne, résidant à Paris (que nous venons de voir récemment avec les frères Moutin), plonge dans ses racines et remonte le temps. En 1791, à Bwa Kayiman (Bois Caïman – Haïti), un groupe d’esclaves sont réunis pour pratiquer un rituel, farouches et furieux, ils sont les déclencheurs d’ une révolte… qui aboutira à la libération du pays. Pour la commémoration (200 ans) de l’indépendance, le nouveau prodige de la scène improvisée, multi-souffleur (saxophones, trompette, flûtes, voix et tout ce que son souffle vigoureux peut faire chanter) invite des amis concernés pour invoquer les ancêtres maltraités et les divinités tutélaires de l’île. L’ombre de ses amis (Ornette Coleman, Pharoah Sanders, Tony Allen…) ont ouvert la piste à travers la jungle, à coup de jazz savant et intuitif, pour accéder au centre des rites vaudous.

Ce ne sont pas des chansons mais un cri. Ce n’est pas de la musique, c’est une cérémonie. Rituels de guérison, clameurs de révolution, exercices de méditation, c’est une messe, une fête qui honore la révolte de ceux qui souffrent et rend hommage à ceux qui ont libéré le jazz.

Suite spirituelle d’une heure, découpée en 21 pistes, actualisant les sentiments de justice et de liberté qui conduisirent la lutte. Lutte toujours présente, animée de mêmes sentiments, qui mène (ou devrait mener) aujourd’hui, tous les opprimés du monde, maintenant bien malade…

Une clameur d’un tenant, les chants se tiennent, s’enchaînent, flottent dans l’air surchauffé, s’incrustent dans les mémoires pour ne plus disparaître, pour se souvenir du chemin vers le soleil qui brille pour tous. Ce ne sont pas (que) 6 musiciens, c’est un corps unique qui marche sur la route qui n’en finira jamais de charrier les assoiffés de vérité.

On retrouve aussi ici la douce folie et la fervente force vive d’autres défricheurs tels : l’art Ensemble of Chicago’, ou certains éléments de l’Arfi, et tous ceux qui mirent et mettent encore leur talent au service de la vraie vie d’homme, avec ses devoirs et ses responsabilités.

Ce n’est pas que de la musique, des sons, c’est surtout une expérience, à vivre, à mieux vivre, entier.

Un commando de musiciens aguerris, soudés, avance d’un bloc, machine tout terrain que rien ne ralenti.

Un rythme en mouvance permanente, des jaillissements de cris de vents, vibrations de cordes, de peaux. Tous ensemble, tous de front. Des morceaux de mélodies, des bouts de swing, du blues à tue-tête, des vagues de free, des bourrasques d’impro, tout se tient, bien !

Jowee n’usurpe pas sa renommée, il est sur la crête de la montagne et emmène ses companeros sur la voie du salut, nous y entraînant à leur suite sur celle-ci !

Fulgurances contrôlées, airs de repos, ambiance de bande de bandits à 2 bras qui franchissent le temps, les sentiments, qui barrent les codes, brisent les cordes, nous prennent en mains et ne nous lâcheront qu’aux abords de la mer ressassant les hymnes de révolte justifiée et de liberté.

Ce sont les plus beaux chants.

Un disque puissant, à charge de nous réveiller, de ne pas oublier, de bouger.

Un manifeste !

Chez : Bash!vallayRecords

Par : Alain Fleche

https://www.facebook.com/jowee.omicil

https://www.joweeo.com/