Plaines

Paul Colomb / Michèle Pierre – Violoncelles

Un ouvrage sensuel, sans affectation, plein d’esprit et empreint de légèreté.

Une fraicheur poétique au bord de l’innocence qui rend ce projet intègre, pas besoin d’autres voix que ces deux-ci comblant le plaisir de l’écoute.

Un projet amoureux oserai-je dire autour des mondes voguant sur la mer de la tranquillité (sans majuscule, il ne s’agit aucunement d’un projet lunaire), tout y est ici simplement réjouissant.

Deux interprètes de grande culture violoncellistique portant de belles richesses soniques et texturales aux qualités expressives indéniables. Ils furent assurément nourris aux douceurs expérimentales du violoncelle contemporain de Jacques Wiederker qu’ils transcendent poétiquement.

Nous retrouvons chez eux, le son français du violoncelle rendant un bel hommage aux imaginaires des mondes, violoncellistes « dessine-moi des mélodies-mondes » !

Les compositions sont lumineuses et offrent un éclairage varié sur les pas de deux dansés en sons.

Moult modes de jeux – double cordes, pizz, tremoli, harmoniques, jeux sul pont, écrasés d’arco, gettato, sons enflés, … et même certains élans de « saturalisme » – révèlent ce que peut être un dialogue entre de belles voix sensibles.

Le tout respire, donnant de l’espace au son, révélant de beaux silences, non pas « le plus rien audible » mais de beaux silences timbriques et rythmiques.

Il y a dans cet opus une réelle capacité à faire émerger des images, des paysages, une musique plutôt impressionniste en somme, le « répertoire » n’est jamais bien loin. à certains moments, les élégies fauréennes rencontrent l’Afrique, la Kora jarabi n’est pas bien loin non plus.

Les improvisations – majoritairement d’obédience pentatonique -, les clins d’oeils au tango et funky-rock, sont soutenus par une rythmique de type mondo-jazz que l’on pourrait souhaiter un peu plus forte dans l’enregistrement.

Ce disque en duo me rappelle les aventures sonores du Kronos Quartet dans Pieces of Africa. Ainsi que les expérimentations pluriesthétiques du violoncelliste allemand Stephan Braun dans ce captivant duo avec Melody Gardot (somewhere over the rainbow) et autres, sans oublier le compositeur britannique Gavin Bryars dans les lenteurs qu’il joue dans ses quatuors « nouvelle consonance ».

Le 5ème morceau semble accueillir un trop grand nombre de pistes à explorer encore et encore … mais qu’importe, bravo !!!

Le graphisme de la pochette représente bien l’imaginaire des voyages proposés et correspond tout à fait au projet.

Je conseillerais vivement aux professeurs de violoncelle des établissements d’enseignement artistique de faire partager ce bel ouvrage à leurs élèves ! Il y a de la beauté du geste dans cet album.

Cette première signature stylistique doit être encore plus émouvante en concert public, et sans doute idéale pour des concerts couchés. J’aimerais en vivre un.

Voilà un premier disque tout à fait remarquable !

Patrick Defossez avec la complicité de AG-D

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