Renaud Garcia-Fons – Blue Maqam

5 étoiles
Solea Garcia-Fons : Voix, paroles
Stephan Caracci : Vibraphone, Marimba
Jean-Luc Di Fraya : Percussions et Batterie
Renaud Garcia-Fons : Contrebasse, compositions et paroles
Renaud Garcia-Fons est un musicien à part qui se joue des frontières musicales. Après une formation classique, il ancre sa contrebasse en jazz collaborant notamment avec Sylvain Luc, Paquito D’Rivera, Michel Portal, Didier Lockwood et l’ONJ. Puis continue sa route par les musiques orientales qu’il mixe au jazz (Album « Oriental Bass » en 1997 période à laquelle je le découvre), il ajoute une cinquième corde à son instrument pour davantage de nuances dans les sonorités. Les musiques indiennes, le flamenco et les musiques baroques font aussi partie de ses études. En 2021 il obtient le prix Sacem du Jazz (« Le Souffle des Cordes »).
Pour ce nouvel album « Blue Maqam » (Sa note bleue personnelle ? Maqam étant le nom d’un mode musical arabe), il nous fait partager une exploration des traditions du monde méditerranéen en un plaidoyer universaliste. Huit langues différentes (français, espagnol, irlandais – seul hors Méditerranée-, arabe, persan, grec, hébreu et italien) composent cet opus où, pour la première fois dans son oeuvre, le chant fait son apparition avec la magnifique voix de sa fille Solea (formée aux chants lyriques et aux musiques traditionnelles).
Les compositions sont toutes de Renaud G.F., les chants de lui, de sa fille Solea ou de poètes.
« Alicante » reprend des vers de « Fatras » de Jacques Prévert sur une vive base jazz avec des échappées andalouses, la voix enjôleuse de Solea brode sur les accords de Renaud à l’archet ou cordes tirées de la contrebasse.
« Najmati » : (Ma bonne étoile) : C’est un cocktail vif et étonnant entamé par un dialogue vibraphone/cordes de Stephan et Renaud sur un tempo presque rock, sur lequel Solea se lance dans un scat énergique puis sur un chant mélodieux où le vibraphone lui fait écho, Jean-Luc s’y glissant avec la même générosité.
« Noimead Siochana » (Un moment de paix) : Jolie ballade aux accents celtiques sur laquelle Solea propose son chant unique avec ses propres paroles irlandaises, la contrebasse à l’archet magnifie le propos.
« Toma el Tiempo » (Prends le Temps) : La voix est haut perchée (en espagnol cette fois), cristalline ou plus basse en accord avec la contrebasse : quelle étendue de tessiture ! La mélodie en boucle portée par tous dont les percussions nous entraine dans son sillon.
« Makrini Akti » (Lointain Rivage » : Lent et solennel chant en grec, cordes vibrées ou frottées, percussions et vibraphone nous entrainent vers ces rivages et sa mer aux tonalités de bleu aussi pures que cet ensemble.
« Towards a New World » : Plus jazzy, au-delà du scat, vibraphone et contrebasse s’entrecroisent puis après une envolée à l’archet plus proche du violon que de la contrebasse, la batterie se distingue.
« Home Chab » (Toute la Nuit) : Poème du mystique persan Rumi (13ème siècle), chanté et scaté. La musique est scandée en boucle non sans évoquer par moments celle des derviches et en même temps à cheval sur la musique orientale et le jazz : incroyable !
« Salam al Haolam » : (Paix sur le Monde) ….On en a bien besoin ! Chanté en hébreu cette fois avec des fulgurances de la vois très haut perché !
« Citta Eterna » (Ville éternelle) en Italien pour le final sur les paroles de Solea et toujours cette osmose réussie entre la rythmique et le vibraphone ou le « violon »/contrebasse et les percussions !
L’album réussit le prodige, bien qu’il y ait ces multiples univers, à proposer une réelle cohérence et une belle unité le tout superbement chanté et joué !
Bref : Si vous aimez sortir des frontières musicales, précipitez-vous !
Label Sound Surveyor Music sortie le 08 Novembre 2024
Chronique de Martine Omiécinski le 26 Décembre 2024
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