Festival Sons d’été au Rocher de Palmer – vendredi 16 juillet 2021

Avant de retrouver ce bon vieux Portal, nous avons le plaisir de découvrir un trio de qualité  » KLT  » . Un pianiste lyrique entre M.Wollny et E. Svensson, une contrebasse qui fait le job et un batteur plutôt rock, très inventif. ils sont rejoint par la chanteuse Jessy Elsa Palma, jeune femme ‘black’ pleine de ‘soul’, qui ne mache pas son swing, scatte comme une grande et finira le gig à la guitare. Une mention pour leur lumineuse version de ‘Solar’.


Après cet agréable ‘mis en oreille ‘, le plateau gourmet : 
Michel Portal : clarinette basse, avec son noyau dur : Bojan Z aux claviers et Bruno Chevillon sur la contrebasse (de voyage). En invités (remplaçants ) : Samuel Blaser : trombone et Pierre-François « Titi » Dufour à la batterie . Notre Basque souffleur nous présente son nouvel opus ; « MP 85 ». On retrouve l’énergie, la poésie, le plaisir ressentis à l’écoute du disque, avec des interventions bien différentes dues, bien sur, au changement de partenaires, et aussi à la spontanéité légendaire de M.Portal, qui est, heureusement pour nous, infoutu de refaire 2 fois la même chose. Michel, Bojan et Bruno drivent la machine de leur complicité à toutes épreuves. Bojan assure les harmonies prévues en embellissant constamment les accords qu’il nourrit d’étoiles et de fleurs, avec beaucoup de fantaisie et d’à propos, et un gros swing largement supporté par un Bruno très volubile sur un instrument ‘allégé’ qu’il fait sonner comme une vraie grand’mère, en pizzi ou à l’archet ; faisant chanter les cordes en permanence, il en met partout, jusqu’à chercher une place pour glisser des contre-points dans les chorus. C’est une brise constante qui rafraîchit et maintient une pression qui profite à tous . « Titi » n’est pas en reste. Il fait le job avec agilité, précision, vraie force tranquille et juste, héritée de sa pratique du violoncelle ?! Le batteur bordelais joue beaucoup dans des projets très variés, lui permettant ainsi une capacité d’adaptation redoutable. Plaisir de découvrir le grand tromboniste dans cette formation. On lui doit, ici, une modification notable du son d’ensemble de par un jeu très personnel, un son plus acidulé que Nils Wogram (tromboniste sur le disque), très à l’écoute du « boss », avec, malgré tout son art que nous lui  connaissons, un peu de retard à l’attaque des tutti au retour de thème … manque de répétition sans doute, professionnalisme de tous aidant, cette faiblesse est largement compensée par une belle unité globale.
 Et puis, le maître de la soirée : Michel Portal, 85 ans, plus beau, plus joyeux que jamais. Plus d’une heure debout, l’oeil et l’oreille aux aguets, toujours très concentré, comme à son habitude, mais avec beaucoup de sourires d’encouragement, de clins d’oeil reconnaissant, une gestuelle précise pour rassembler sa troupe qui tourne comme il se doit (et à l’oeil). Bien sûr, ce n’est plus la tornade des années ’70, la folie inventive que nous lui connaissions. Elle est cependant compensée par d’autres sentiments qu’il a largement développé depuis quelques années : toujours le doute et la générosité, mais avec plus d’amour, pour ses musiciens et auditeurs à qui il s’adresse fréquemment, présentant les morceaux ou narrant quelque anecdote avec humour, spécialement pour introduire certains titres qui ne sont pas sur le disque (Cuba si, Cuba no). Rassurons-nous, de la hauteur de ses 85 printemps, il lui reste bien de choses à nous dire, à sussurer, à exposer, à exploser. Comme si la clarinette basse n’était pas un instrument suffisamment exigeant, il lui prend de jouer sans le bec, ou qu’avec le bec. Il se balance selon les notes qui sortent du pavillon, de son esprit toujours fertile que l’on sent intarissable. 
Une très belle prestation d’ensemble, dirigée par un très grand artiste qui ne prend pas un gramme de ride dans la beauté de son exercice. Rappellé 2 fois, le concert généreux se termine par le « chant basque » de Michel, juste assez pour nous donner envie d’être au prochain ! 
Longue vie à toi, l’Artiste, continue à nous faire rêver et swinguer encore longtemps !

par Alain Flèche, photos Alain Pelletier