© Jean-Baptiste Millot

Il se sera fait attendre, mais il est bien là : le quatrième opus de votre série signée la Gazette Bleue. Pour ce dernier épisode, nous vous proposons de quitter Cristal Records et sa Charente-Maritime pour rejoindre La Corrèze du Maxiphone, label (mais surtout collectif) et son directeur Fred Pouget, compositeur, arrangeur, et interprète au parcours bien fourni. Orienté très tôt vers la musique, il grandit en écoutant Jacques Higelin, Léo Ferré et développe un intérêt pour la musique qui ne le quittera plus. Diplômé en musicologie à Paris 8, il devient accordéoniste, sonneur, puis s’oriente définitivement vers la clarinette, fait de parler de lui dans des projets aux côtés de Jean-Marc Padovani ou Francis Mounier. Profondément attaché au partage de la musique, Fred Pouget participe à la création du Maxiphone dont il est le directeur artistique aujourd’hui. Par le collectif crée en 2001, puis le label depuis 2016, Le Maxiphone participe depuis près de 20 ans à la mise en place de projets mêlant musiques improvisées et traditionnelles.

Lors d’un entretien accordé à la Gazette Bleue au mois de mars, Guillaume Schmidt avait présenté le Maxiphone comme un grand ensemble avec Géraldine Laurent, Alain Bruel notamment avant de devenir le collectif que l’on connaît aujourd’hui. Vous fondez le collectif en 2001 aux côtés de Claude Barrault, puis le label en 2016. Pouvez-vous revenir en détail sur la création du collectif et du label le Maxiphone ?

Nous avions un objectif clair lors de la création du collectif qui était de rassembler des gens autour des musiques originales et improvisées autour de trois axes : les concerts et les spectacles tous publics, un axe jeune public adapté sur de petits formats avec un travail porté sur la lumière et la scénographie, puis un travail de médiation autour des propositions du collectif et des réponses aux sollicitations diverses et variées. Et c’est ce que nous défendons depuis 20 ans.

Le label quant à lui a été créé à la suite des déboires rencontrés par la Fondation Laborie. Ce projet était une co-production Le Maxiphone/Laborie Jazz, et a été achevé lors de la disparition de la Fondation, ce qui nous incité à croire que le projet n’allait pas sortir. On enregistrait dans les locaux de la Fondation à Limoges, et on s’est retrouvés un peu inquiets. On a réussi à sortir le disque, mais on s’est concertés et mis d’accord sur le fait que la meilleure idée était de tout faire nous-même. Nous avions ce projet en tête depuis longtemps mais il n’a pas été mis en place de suite car on préférait utiliser l’argent pour la création de spectacles plutôt que sur la production de disques. Nous avons décidé de le faire aujourd’hui car même s’il est évident que les disques font perdre de l’argent aux labels, ils restent un support de communication et d’échange génial pour faire découvrir notre travail aux gens que l’on rencontre. Cet événement avec La Fondation a été le point de départ de la création du label, mais je pense que l’on aurait fini par le créer dans tous les cas.

Quels sont les objectifs du collectif le Maxiphone ?

L’objectif est avant tout de donner la possibilité aux gens de découvrir le jazz, en lui retirant cette étiquette de « musique d’intello ». Je ne saurais comment l’expliquer, mais il y a eu à un moment une coupure avec le public et le jazz a souffert de cette image élitiste qu’il possède encore aujourd’hui. Notre objectif est de trouver des façons de l’amener à tous, et c’est la raison pour laquelle on le fait découvrir au jeune public par les spectacles, pour qu’ils se disent « moi j’ai entendu ça et c’était vachement chouette. ». Avant le premier confinement, j’organisais des ateliers en classe où j’apprenais aux enfants à faire de la musique avec rien, des graviers ou des bouts de bois. Dans les classes, il y en a que deux ou trois qui font de la musique, et les ateliers permettent aux autres de découvrir la notion de musique et d’improvisation. On écoute, et on réagit à ce que ça donne.

Aujourd’hui le label possède un catalogue de 8 projets, ou l’on peut retrouver Claude Barthélemy, Didier Fréboeuf, ou Mox Quartet qui est le dernier projet en date. Comment procédez-vous dans la sélection des artistes ? Vous avez des critères particuliers ?

Les disques produits dans le label deviennent tous des projets scéniques. Je travaille forcément avec des gens avec qui je partage des points de vue artistiques qui ont un sens et qui méritent d’apparaître au sein du Maxiphone. Nous avons un fond commun autour de la musique et je ne produis en aucun cas des projets de personnes qui ne font pas partie de la compagnie sauf dans certains cas. Un musicien ou une musicienne quelconque qui me fait parvenir un projet qui me plaît pourrait être produit chez nous mais ça prendra du temps, car nous n’avons pas vocation à produire les projets de tous. Nous n’avons ni les moyens financiers ou humains pour faire vivre un label à moyenne échelle. Il ne faut pas oublier que Le Maxiphone est avant tout un outil pour produire des spectacles, ce qui nous prend déjà énormément de temps. Trouver des financements et des partenaires demande du temps que nous ne pouvons utiliser à part égale pour un label, à moins de ne plus dormir. Travailler sur des spectacles le jour et sur un label la nuit n’est pas possible pour moi (rires).

Donc le Maxiphone ne se fixe aucun rythme de production ?

Aucun. Nous travaillions il y a quelques temps avec un distributeur jusqu’au dernier disque de Mox Quartet et les deux prochains disques seront distribués par les Allumés du Jazz dont nous faisons partie du catalogue. C’est une petite activité et nous ne savons pas si nous sortirons encore des disques en 2022 ou 2023. Tout ça dépendra de beaucoup de critères : si les spectacles tournent et si on a un peu d’argent d’avance, on le fera et si on n’en pas, on le fera mais plus tard. Ça n’est pas une priorité. L’économie du collectif dépend de la vie des spectacles, dont une partie permet le fonctionnement du label.

Quels sont les projets du label et du collectif à venir pour 2020 ?

Pour l’avenir, nous avons deux disques en préparation : L’un de Didier Fréboeuf en collaboration avec Christiane Bopp au trombone et Didier Lasserre. Ce dernier devait être enregistré durant le printemps mais a été reporté pour 2021, car il y a eu un petit contretemps comme vous devez le savoir (rires). C’est un disque totalement improvisé. Le deuxième disque sera celui de Guillaume Schimdt qui va travailler et repenser la musique des années 60/70 avec des sons analogiques et une ambiance mêlant sons pop et jazz. ). Notre dernier spectacle Miniatures et Moulinettes aura lieu la saison prochaine. Je ne sais pas comment le définir : C’est une installation sonore avec un danseur, des musiciens qui bougent, une comédienne qui fait sa lumière, donc c’est un spectacle multi-formes qui va jouer la saison prochaine.

Suite au confinement, 2020 a été une période difficile pour les artistes devant l’annulation des concerts et des festivals. Est-ce cette période a impacté le fonctionnement du collectif et du label en général ?

C’est une période difficile qui va l’être pendant un moment encore, car elle est arrivée pendant un moment charnière de l’année où avaient lieu les festivals de l’été, à l’exception de Jazz 360. On a dû reporter nos projets sur la saison prochaine, donc il n’y aura pas de place pour des choses nouvelles. Je ne sais pas comment ça va se passer mais on garde le moral ! (rires)

Qu’est-ce que vous nous conseillerez comme album à écouter dans le catalogue du Maxiphone ?

Tout ! (rires) Plus sérieusement, Je crois qu’il faut vraiment écouter le disque solo de Didier Fréboeuf qui s’appelle « Piano Sounds », le CLAX Quartet qui a notamment été cité dans les 10 disques des Inrocks à écouter pour la rentrée, et les projets de Didier Barthélémy entre autres.

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