Pascal Lovergne – Palace Sessions

Pascal Lovergne / une basse acoustique / un micro

Curieux musicien, avec un curieux instrument, qui fait un curieux disque pour des oreilles curieuses.
Musicien singulier peu connu hors sa région natale (Lille) où il détient une place prépondérante à plusieurs titres. Prof. de basse, directeur d’un atelier Jazz, bardé de médailles or, étudie la musique indienne (konnokol : musique du sud, axée sur la percussion et son influence sur le public), travaille sur les problèmes auditifs et leur résolution par la musique, compose et joue pour les enfants…. Actuellement, participe activement à la scène locale dans de nombreuses formations (rock, enfants, jazz), joue avec des amis indiens, et toujours prof de guitare basse.
Instrument peu usité dans cette version acoustique que l’on ne rencontre guère qu’ailleurs la musique latino-brésilienne. Elle s’apparente autant à la basse électrique qu’à la guitare acoustique (avec un long manche et 4 cordes), en utilisant le doigté de celle-là mais avec une profondeur de son la rapprochant de celle-ci.
Projet d’instrument Seul, qui rappelle (essentiellement dans l’exercice) ceux de V.Courtois ou de R.Garcia-Fons, avec le son propre, propre à cet instrument, chargé de tout le passif, bien rempli, du musicien que voici. On y retrouve une solide base Blues jazzy colorée de puissants éclats de ragas indiens, qui évoquent les déserts de Californie, et l’infinité de la mer, de l’espace sidéral, et celui, très intimement, intérieur.
Un touché délicat, laissant une large place à la respiration du silence, semblant bousculer les barres de mesure, malgré une rythmique pourtant bien carrée.La virtuosité ne s’impose pas d’elle-même dans cette pièce d’un professeur s’adressant à tout auditeur, quelque soit l’âge ou la culture, seule nécessité étant la disponibilité-réceptivité de chacun, effort facilité par la simplicité, l’évidence des compositions et leur exécution, qui n’exclut pas, loin s’en faut, une dextérité et une clarté étincelante.
Les différents styles (Blues, Raga, Chanson) ne se suivent pas, ils se superposent, s’entremêlent. Des mélodies qui flottent comme un voilier livré à lui-même sur un océan sans rive, perdu dans un rêve de brumes, mais sûr de sa route qui lui fait maintenir un cap, accroché à un bois flotté, suivant le courant qui le conduit vers d’autres inconnus rassurants.
Travail rigoureux pour une recherche de liberté totale. Le jazz connait bien ce sentiment de liberté possible, conseillée et assumée dans un cadre proposé, elle est dans le sentiment dont on charge les notes, étirées ou racourcies, les émotions qui hantent les lignes mélodiques, et les silences, encore, que l’on a trop tôt de combler, plutôt que de profiter de la vacuité qui relève de l’infinitude du rêve blanc, du voyage à l’intérieur de l’âme, du corps qui s’absoud dans l’espace principiel,  pour ne re-devenir qu’esprit.
Et la musique indienne dans tout ça ? Qui pourrait encore prétendre qu’elle ne swingue pas. C’est du blues paré d’autres couleurs…
Merveilleux petit disque (22 minutes) pour se laisser le temps… de prendre son temps !

Par : Alain Fleche
Auto-production