Nefertiti – Live in Paris

Delphine Deau : Piano, compositions / Camille Maussion : Saxophones / Pedro Ivo Ferreira : Contrebasse / Pierre Demange : Batterie

Le quartet de jeunes musiciens fête ses 10 ans d’existence. Ils se sont rencontrés au conservatoire de Paris… et l’aventure continue. On marque le coup avec une pierre de touche qui fait montre de maîtrise personnelle et de complicité intime qui a soudé l’ensemble dans la cohésion d’un son unanime. L’équilibre est stabilisé, même si on est souvent près de déborder dans les marges, et heureusement, les prises de risque étant toujours de bon aloi, la machine bien huilée, bien rodée, avance de front, dans la certitude que permet l’expérience générale et le talent individuel. Équilibre qui se retrouve aussi dans la parité du groupe : 2 garçons pour la rythmique, 2 filles à l’harmonie, qui se mélangent pour générer du plaisir à distribuer à qui n’en veut, on prend !
La pianiste est dans la ligne directe des grands ‘classiques’, avec l’avantage de son vécu dans l’air du temps, propose de fines compositions que chacun habille, habite naturellement pour en faire des évidences d’interprétation. Les 2 mecs de la section du rythme ont une complicité imaginative qui colore le(s) temps d’un chatoiement sans cesse renouvelé, ils assurent les changements de tempo en parfaite syncro avec l’inventivité des 2 dames. La saxophoniste, dans une sobriété insolente mêlée de fulgurances ascensionnelles époustouflantes qui en doit autant à W.Shorter qu’à P.Sanders, bien située dans l’esprit coltranien, pousse le piano vers des accents Tyneriens, pour s’envoler dans des transes spirituelles où elle nous embarque joyeusement dans ses délires mystiques contrôlés.
L’album ouvre sur une ‘Danse Futuriste’. Sans doute sommes-nous des voyageurs du futur pour avoir des picotements au niveau des membres qui appellent au trémoussement et sautillement… à moins que ce ne soit le swing qui affleure à chaque notes que distille les 4 magiciens du son organisé. La résolution du nom du quartet se découvre dans la chanson ‘Nefertari’, autre reine symbolique de l’Egypte ancienne, où on entend en filigrane les accords du fameux thème de W.Sorter, vérifié par l’exposition de la mélodie, inscrite dans indélébilité de notre mémoire, à la fin de ce petit, mais finement chargé, morceau de 2 minutes. Le dernier extrait parle de ‘vague à l’âme’. Vague où surfe le saxo sur des arpèges changeants du piano avant obstinanto qui libère le souffle s’épanouissant comme un vent fou multidirectionnel, poussé par des éclats de frappes sur peaux et cordes, puis, le piano Debussyne, fredonne, alanguissement introspectif que rejoint la contrebasse en contrepoint, formant un tapis mouvant pour un sax presque orientalisant… un régal d’arrangement entremêlé, enchevêtré entre ombre et clarté.
Les autres titres, à l’avenant, sont à découvrir dans cet opus truffé de charmes nouveaux et d’idées originales qui en font un disque à part, sous l’étiquette : « Belle musique pour ‘happy few’ à écouter en toutes occasion ».

Chez : Berthold Records
Par : Alain Fleche