Inside dreams

Tout amateur de jazz sait que le terroir italien est propice au jazz. Outre les festivals qui animent les chauds étés de Perugia (entre autres), les Flavio Boltro, Paolo Fresu, Enrico Rava, Stefano Di Battista, Aldo Romano, Enrico Pieranunzi, Giovanni Mirabassi… (que les autres me pardonnent) sont très présents en France, que ce soit en tête d’affiche ou en sidemen. Tous sont pétris d’un talent que personne ne boude de ce côté-ci des alpes. Dans la potentielle très longue liste, laissez-moi vous présenter une découverte.

Maurizio Mecenero est un guitariste et compositeur italien originaire de Vicenza (entre Verone et Venise, grosso modo), histoire de vous en apprendre un peu plus sur ce musicien quasiment autodidacte qui débute l’instrument vers 14 ans. En googlisant un peu on découvre que c’est d’abord le rock qui l’attire vers la guitare :  Led Zeppelin, Jimi Hendrix, Queen, Dire Straits, Santana. Mais, là où beaucoup d’ados s’arrêtent après avoir atteint leur objectif, c’est-à-dire épater une ou deux conquêtes féminines avec 2 accords, lui, poursuit l’étude de la 6 cordes et se produit vite avec des groupes de sa région.

A 17 ans il découvre le jazz et fréquente l’Ecole de Musique Thelonious à Vicenza, jusqu’à ses 21 printemps. Il se rend alors à Milan où il se perfectionne, au point de revenir au pays, à l’âge de 25 ans, comme professeur à la « Dali Music School » de Vicenza.
Sa rencontre avec le jazz-fusion, et particulièrement la musique du Pat Metheny Group et de Mike Stern, est un coup de foudre et l’étincelle qui lui font penser à composer ses propres morceaux originaux.

En 2006 il forme un trio jazz-fusion, le Mecetrio, qui reprend notamment le répertoire de Wes Montgomery et Miles Davis. Avec l’arrivée d’un pianiste à la formation le Mecequartet peut enrichir son répertoire de l’univers de John Scofield, Herbie Hancock ou Chick Corea.
En 2011, il compose son premier album, « Upward », avec la participation du percussionniste Valerio Galla qui se greffe durablement au quartet en 2015. Le « Maurizio Mecenero Quintet » publie un deuxième album « Secrets of light » la même année.

« Inside dreams » est donc le troisième album, de Maurizio Mecenero et, sans connaitre les 2 précédents, il faut avouer que la maturité de l’écriture, du son et de la production n’a rien à envier à ce qui vous fait déjà vibrer quand on annonce George Benson, John Scofield, Mike Stern, Pat Martino, Dean Brown, Hiram Bullock et Pat Metheny.

« Inside dreams » c’est un peu la synthèse de tout cela, sans jamais imiter, sans aucune démonstration, sans débauche d’effets téléphonés, sans la moindre sucrosité excessive ; Mecenero maîtrise à la fois le sens de la petite mélodie qui accroche et le développement qui ne tombe jamais dans le délayage. Aussi à l’aise avec la Gibson que la Fender Maurizzio débute l’album par un titre sans équivoque « Song for Miles ». Un très gros groove que Simon Philipps et son Protocol pourraient envier. Après quelques envolées électriques la trompette bouchée prend un chorus ébouriffant jusqu’à la Coda. Ça décoiffe ! On serait tombé sur un CD qui tourne à la démo, un peu à la Dave Weckl des 90’s. Pas du tout ! « Take Away » et « Silver Blues » s’annoncent plus bluesy et l’univers sonore réchauffé par un Hammond B3 donne d’autres couleurs au phrasé de guitare. Ses compatriotes compagnons de studio (assez nombreux sur cet album) ne sont pas en reste ; les amateurs de basse fretless apprécieront notamment la ligne en double corde sur « Endless love », magnifique ballade mi-tempo très romantique !

« Crazy Day » sonne beaucoup à la manière de Billy Cobham, alternant rythmes binaires et ternaires ! Du vrai jazz fusion avec un sax tenor qui rappelle les plus belles cartes postales californiennes de David Sanborn. « Borderline » est certainement le plus Methenyen de tous les titres de ce CD, très inspiré, vous l’aurez compris par l’esprit, le jeu, les rythmes de ce style « fusion », souvent décrié, détesté par certains, adoré par d’autres (dont je fais partie) et qui se renouvelle sans cesse depuis ses débuts, tout en se nourrissant aux sources du passé.

La dernière plage, « Little infinity », un duo piano guitare sèche, parachève l’œuvre comme un pied de nez à tout ce qui a précédé.

A découvrir d’urgence !

Preludio

Vince