Genius Loci North

Chouette, une nouvelle perle que nous distille ce trio extraordinaire, emporté par la voix fabuleuse de Jeannette. Quel magnifique cadeau, pour tous et pour tous les moments de l’année !
Interprétations libres des liner lines de Jeannette sur le disque (c’est tout de même la Dame qui parle le mieux de son travail -héhéhé-) :
« Voici de nouvelles chansons enregistrées au bord de lacs et de montagne au Québec (entre juillet 2020 et août 2021), faites d’énergie et de rêves, les miens, les nôtres en échange entre amis. Les chants sont composés d’une traite, enregistrés immédiatement, une prise suffit ! Comme peignait ma mère : des traits et lignes sur la toile, souligner les forces qui apparaissent automatiquement et s’imposent d’évidence ». Alors, une fois de plus : compositions instantanées, improvisations préparées, (bonne) pioche dans l’essence du temps qui Est ! Il faut être fou et sourd (à la vie) pour continuer à se poser ce genre de question face à la Force de la création pure ! « . Ensuite, Jeannette parle de ses acolytes, nous y reviendrons… elle y inclus ses enfants qui participent de toutes leurs aventures, musicales, et humaines : propositions, idées, graphismes, chants en forme de poésie d’une conversation intérieure improbable, proposée au milieu de nulle part… Peuplent ce disque, une foultitude de formes étranges et indéfinies : des personnages dessinés, des corbeaux, des corneilles blanches, un cardinal nordiste, quelques crapauds-buffles et des amis sans téléphones, des collages de voix… Comment capturer l’esprit des lieux ? lorsque les gens viennent juste de passer rapidement ou bien n’étaient pas là du tout ? Alors, autant discuter avec les plantes et les paysages, et la vie sauvage ! C’était mon père qui bricolait avec le son d’Eric Dolphy, notre ami Mischa Mengelberg nous parlait du travail d’Eric en compagnie du chant des oiseaux et maintenant je suis reconnaissante aux oiseaux de leurs pépiements colorés. Là, je voulais juste célébrer la beauté de la nature, comme le suggérait Cecil Taylor jouant les poètes au milieu des Rocheuses, je voulais souligner l’importance de ce qui Est encore, et lègueront bientôt, trop tôt ; il nous faut tout cesser et écouter ce que nous racontent les créatures autour de nous, plus souvent ! Pour échapper aux vicissitudes de la pandémie et autres horreur, nous nous sommes réfugiés dans la mère-nature, nous en avons capturé des morceaux pour vous les ramener, vous rendre heureux et les transporter partout Il vous vient un peu de mélancolie au souvenir d’endroits perdus, ou oubliés, en roulant ou bien en faisant la vaisselle, n’oubliez pas d’être en pleine conscience et restez optimistes ! »
La vie de Jeannette est une poésie ininterrompue. Elle sourit comme elle chante, parle sans doute ainsi aussi… une fée nous raconte… sa voix s’affine, diaphane, parle aux oiseaux, en fait, c’est Elle qui prolonge le travail d’ Eric : alignant des notes très éloignées, précipitées et aussitôt rangées, calmées, posées, distinctes, claires, un filet de source qui enfle ou se raréfie. Les oiseaux lui font danse, elle tutoie les anges, et ne baisse les yeux que devant la Beauté absolue qu’elle approche un peu plus à chaque opus !
Reg, le frère de la Dame, n’a jamais été aussi précis, lumineux, juste, et beau. Le son de la guitare est fantastique, juste ce qu’il faut d’écho et de présence, les accords, les arpèges intimement liés, coulent aussi d’une source claires qui chante entre les cailloux évités, suit les rives changeantes parsemées de fleurs et d’animaux aussitôt familiers. Des bribes de brise soulèvent d’autres notes qui se cachaient dans les bulles du temps pas encore passé, et nous les imprimons dans nos pensées colorées pour embaumer celles qui les approcheront.
Et puis, ce bon vieux Michel… intarissable, insatiable, sans être bavard… juste là ! tout le temps, par tous les temps : de joie, de surprises, d’attention et de libération. ll joue de la cuisine, ont est à la maison, des louches cognent des gamelles, les couvercles chahutent, sortes de gongs dociles et rigolards, on dirait que tombent en pluie, des bruits qui font sens, qui font sons, on s’attend bientôt à sentir des parfums de repas célestes que nous serviront les elfes de la montagne. Et puis, aussi, beaucoup plus sérieux, inspiré, concentré : mossieur Michel joue des Tablas, imposant à l’écoute et au respect. Des indiens jouent au jazz ( Allah Raka chez J.Mc Laughling), alors des jazzmen se frottent à cette tradition ho combien exigeante et précise de l’art traditionnel indien (qui a toujours inclus l’impro. !) . Michel nous a confié qu’il en bave, grave ! Mais il est maintenant sur la voie de la beauté et ses envolées nous rapproche, elles aussi, des anges !
Bref , dès les 1ères notes, nous sommes forcément à portée d’oreille et d’âme du nirvana, il est là, tout proche : « Et attrapez la queue de la comète d’amour ! ». Ce disque est un cadeau du ciel, que nous tendent ces 3 spirales de talents croisés. Surtout, écoutez moi ça : le bonheur à l’état pur, à portée de main, de cœur et d’âme ! Un grand Choc, très chic, mais chut, pour les amoureux de la vie seulement !

JEANNETTE LAMBERT : Voix, compositions
REG SCHWAGER : Guitare
MICHEL LAMBERT : Batterie (et pis des tas de trucs)

Chez : JazzRant
Par : Alain Fleche