Life & Umbrella

JAVIER RED : Piano, Compositions
GUSTAVO CORTINAS : Batterie
JAKE WARK : Sax Ténor et soprano
BEN DILLINGER : Contrebasse

Joli projet sous-titré : Promouvoir l’empathie, la compréhension, et la sympathie envers ceux qui sont atteint d’autisme, proposé par le pianiste mexicain, basé à chicago, papa d’un garçon atteint d’un trouble autiste. Ce sont 12 chansons décrivant les émotions, le monde intérieur, le quotidien d’un enfant handicapé, et le ressenti des parents. Devant la difficulté de communication entre ces personnes et ‘les autres’, la musique tend à créer des liens émotionnels entre eux pour une compréhension réciproque, imaginant des ponts de rencontre pour briser les murs d’enfermement où chacun se réfugie par frilosité ou par incapacité d’expressions usuelles. 
Pour créer cette relation nouvelle, il fallait une musique différente, hors codes et cadres déjà entendus.

Exercice intellectuel ? pas seulement ! Il y a une approche rythmique organique, sensitive, instinctive, un espèce de décalage déroutant mais réglé au cordeau qu’il en paraît naturel, logique, juste quelque chose de différent. Dans ses références, Javier Red cite la grandiloquente exubérance de Stravinsky, et les trouvailles rythmiques de S.Coleman.On pense aussi aux inventions très personnelles de E.Satie, et à la folie particulièrement attachante de T.Monk, qui passa ses dernières  années dans un mutisme total. Cette musique est le résultat de plusieurs années de travail, restait à la matérialiser. 


Pour se faire, un sax basé aussi à chicago est convoqué. Reconnu  comme éducateur, compositeur, improvisateur, il joue avec tout ce qui bouge dans la région. Sa créativité lyrique s’adapte à toutes les géométries et nouveautés où il est sollicité. Tantôt suivant le groupe, tantôt débordant la ligne floue d’un cadre mouvant, ses impro fourmillent d’idées originales qui éclairent les harmonies souvent sombres, malgré les tentatives de gaieté et certaines lueurs de rédemption. Une batterie assure les non-tempo où s’appuie les compositions libres du pianiste qu’il suit note à note approfondissant le groove qui permet de dégager les mélodies pourtant déroutantes où les solistes vont pouvoir trouver la place pour s’exprimer. Il est largement secondé par la contrebasse qui ne le lâche que pour souligner des riffs de piano. Véritable colonne de l’ensemble, précis et  toujours présent dans les dichotomies permanentes des morceaux dont cette section rythmique soutient l’architecture ‘bizarre’.


La musique obtenue est fouillée, déroutante mais attachante, avec de l’émotion mais sans sentimentalité excessive, elle invite à la réflexion. l’esprit de l’auditeur vagabonde, les repères sont faussés et il se doit de lâcher prise pour suivre une nouvelle logique non euclidienne et s’inventer une forme d’écoute libérée de concepts casuals et de progressions habituelles. Juste s’immerger dans un discours étranger où seuls la disponibilité de compréhension et le désir de partager cette expérience indispensable pour la communication généralisée des êtres humains, permet de jouir de cet évènement , d’abscons devenant évident. 
Projet ambitieux, casse-gueule, passionnant pour un bien beau plaisir d’écoute. Une perle rare ! 

Chez : Desafio Candente Records
Par : Alain Fleche