Puissance de la douceur

JULIEN SORO : Saxophone, Clavier, Electro
PAUL JARRET : Guitarre, Electro
ARIEL TESSIER : Batterie, Electro
48 minutes extraites de 6 heures d’enregistrement ‘Live’ de musique improvisée par 2 du « PJ5 » et le sax du « Pink Machine » et de « Big 4 », ça décoiffe, grâve ! Le ‘Chien’ est rarement chaleureux et on entend plus de ‘Puissance’ que de ‘douceur’. C’est du feu, et pas que dans la cheminée, c’est dans l’air, dans le temps, dans le sang. Douceur, dans le sens de Anne Dufourmantelle « … Parce qu’elle a ses degrés d’intensité, une force symbolique et un pouvoir de transformation qu’elle est une puissance », c’est le bonbon dans la main prête à frapper, c’est le chemin détourné, escamoté qu’emprunte la violence qui se camoufle avant d’exploser, c’est l’apparente fragilité des sons diffusés par les notes, les silences, les souffles, les crissements, frottements et autres coups abatus qui expriment le sentiment de l’instant présent asséné ainsi aux auditeurs, et aussi aux musiciens (la musique se faisant d’elle-même) qui réagissent en symbiose en affirmant une proposition … ou changer de sujet, avec grâce et justesse.
Des paroxysmes instrumentaux et des moments, tout de même plus doux, presque fragiles, avec un semblant de mélodie, mais toujours avec une tension contenue, le son un peu ‘sale’, des notes à peine justes parfois, qui révèle une colère à fleur d’autres sentiments confus, un besoin de liberté totale qui se cherche à travers des instruments encore à inventer… bien que nos toutous maitrisent parfaitement le leur et que l’électronique (pour une fois) apporte beaucoup à l’expression désirée, et trouve ici son plein emploi.
Etiquette ‘Jazz’ pour ce trio qui pourrait être qualifié de ‘rock noisy’ si ce n’était de l’impro instantané, avec des vrais morceaux de ‘Blues’ dedans, enrobé d’électro, donc, pour une musique puissante et faussement douce, presque inquiétante, résolument étrange qui mettrait mal à l’aise si elle n’était, aussi, hypnotique et fascinante, entre ‘Drame japonais’ et humeurs acides de ‘Tarrentino’.
La guitare se faufile, serpente dans un magma d’où on attend une lumière, mais ne filtrera que nuages lourds et pluie battante sur des paysages que l’on aimerait découvrir sous le soleil… ou pas. Une batterie convulsive, énervée, tempête, ouragan lorsqu’elle brise son silence patient. Sax Ténor qui mord et arrache, gros son qui impose chaque note comme indispensable et triture la matière brute pour en libérer l’âme, à mettre dans le même sac(x) que Antoine Viard (c’est un compliment)
Encore A.Dufourmantelle en guise de guide : « La douceur est en effet une dynamique qui porte la vie, une résistance à l’oppression politique, sociale, psychique, un combat contre le cynisme actuel. Faire un pas de côté, réfléchir, “dire non” ce qui est aussi une façon de revenir à la vie, à l’envie! » Voila, tout est dit, à l’envie, à la vie… et l’amour n’est jamais bien loin ! Exact traduction de notre vie présente.
Pas pour toutes les oreilles, juste pour les curieuses du Vrai, du Juste, du Beau !
Chez : Pégazz
Par : Alain Fleche