Twofold head

L’histoire commence en 2016, le duo fait un succès lors d’un 1er ciné-concert à Montreuil, espérant bien poursuivre l’expérience. Lorsqu’ en 2020, la courageuse nouvelle maison d’édition PeeWee! sollicite à nouveau la dame ‘sage’, alors en cours d’enregistrement et de tournage, avec Simon, c’est donc en retour sur cet ancien projet que va se construire le nouvel opus de ce fameux couple qui ne cessera donc jamais de nous interpeller et de nous passionner de par leur liberté d’esprit et de jeu !
Leur univers particulier, un peu sombre, introverti et très personnel les font se rapprocher du travail de David Linch, lequel ne fait pas spécialement dans la joyeuseté non plus. Ici, la musique composée et improvisée n’est pas l’illustration d’un film particulier, mais issue de la navigation entre 6 courts métrages sélectionnés dans l’oeuvre du metteur en scène… que l’on n’est pas obligé d’apprécier, ni même de connaître (quoique) pour rentrer dans le monde des Deux (Twoflold) . Ouf !
Il arrive de s’imaginer des musiques en visionnant des bouts de film, et bien plus souvent des images apparaissent en écoutant une musique, voici une belle invitation à se faire son propre film ! Tous les ingrédients sont là : des débuts d’histoires, des rebondissements, des poursuites, un poil de romantisme, des vrais morceaux d’action, des émotions instables, évolutives, indéfinissables… Mais ne comptez pas sur eux pour vous indiquer la fin du film, ni vraiment le début non plus ; plutôt une boucle, un ruban de Moébius… une ambiance.
Une ambiance noire comme un polar, un vertige comme de marcher sur un fil les yeux bandés, une partie de cache-cache dans un terrain vague recouvert de brouillard jaune et glauque. On avance dans cette oeuvre onirique à pas de loup en pantoufle et le souffle court, sans  agression directe, mais …  un sentiment d’inquietude de ne trouver aucune résolution aux images contrastées mais ternes qui s’affichent en noir et blanc, au rythme des notes et des silences envahissant l’air qui serait nauséeux sans l’art affinés des duettistes qui jouent à nous faire peur… pour de rire, pour le plaisir de nous faire réfléchir à notre condition , sujette à notre environnement immédiat (!?!). Oui, l’art est là ! Ce qui permet de s’amuser des frayeurs provoquées, comme des enfants devant un spectacle de guignol, on se cache les yeux, les oreilles, mais pas tout à fait pour ne pas en perdre une miette tout de même.
Et puis, enfin,la musique. Belle comme la sagesse chevauchant les  frappes de Vulcain. Les coups tombent, jamais au hasard, pas comme on les attend, mais comme on les espère, en mieux. Des notes égrenées, ou plaquées, en suspend, ou assénées, douces et amèrement cajolantes, ou presque violentes d’un désir de balayer ce qui précédait. Les 2 artistes sont à la hauteur de ce que l’on peut attendre à entendre. Juste l’expression de la Beauté qui n’a que faire de sentiments ou de valeurs, d’espérances ou de préjugés qui ne concerneraient que l’individu.
Juste la Beauté nue, où tous nous retrouvons en communion. La Beauté qui se joue des nuances, du sombre ou du lumineux, de la joie ou de la nostalgie… mais qui est, absolue !
Un disque, comment dire, Juste Beau !

PS : Il y a un bonus à quelques secondes du dernier morceau pour les plus patients, ou les plus rêveurs. Quelques gouttes d’eau pour noyer les larmes d’émotion qu’ont provoqué l’écoute de ce beau disque

SOPHIA DOMANCICH : Claviers
SIMON GOUBERT : Batterie
Chez : PeeWee!
Par : Alain Fleche