Molly Malones, Bordeaux dimanche 08 août 2021.

Si par hasard, vous vous promenez Quai des Chartrons à Bordeaux le dimanche après-midi vers 18h30, alors arrêtez-vous au numéro 83 ! Mais oui, vous êtes bien au Molly Malones ! Un incontournable « traditional irish pub restaurant », où il y a toujours tout pour vivre le fameux « bon temps rouler » de fin de week-end ! Un accueil aimable, et puis, épicurien un jour, épicurien toujours, de bons petits plats, de bonnes bières et enfin et surtout, de la musique, et de la bonne, dans des styles très différents, de quoi satisfaire tous les goûts.

Ce dimanche, scène ouverte à un groupe au nom mystérieux mais fort révélateur : Les Random Soul Hip Jazz. Avec un tel nom, presque tout était dit de ce que nous allions vivre lors de trois sets bien garnis, où les trois styles évoqués se sont amoureusement enlacés, par le hasard d’un groove allant crescendo, grâce à un solide combo mené par Romeo Stocchi (chant, rap, paroles), entouré de ses parents Rachael Magidson (batterie, chœurs, organisatrice de ces sessions) et Domenico Stocchi (basse, chœurs), et de Manuel Gablain (claviers, bugle, chœurs).

Dès le premier morceau, un charme instantané opère, la magie d’une soul groove très US style, qui se réveille et s’insinue, par la voix du chanteur, soft et rêche à la fois, qui semble en connaitre un sacré rayon, et le prouve par ses intonations gorgées de feeling. Mais on le découvre aussi rappeur affuté, rappelant un peu Nya (qui rappait jadis dans les albums 90s d’Erik Truffaz), son flow rythmique étonnant venant tatouer la musique, avec des paroles chiadées de son cru. La complicité indispensable des trois autres compères porte cela. Des chœurs chaleureux à l’unisson, des nappes soyeuses de claviers, un soupçon seventies, parfois alternées avec de belles envolées de bugle, une basse à quatre cordes, précise, sobre et grondante à ravir, et une batterie simple et efficace, guettant la moindre opportunité de faire jongler baguettes et balais, « The main ingredient » comme dirait la grande Shirley Horn, voilà tout ! C’est un peu l’histoire de la Great Black Music qui a ainsi défilé, où soul, hip hop et jazz militants on fait groover les tables, de plus en plus garnies. Impossible de résister à des pépites come « Pusherman » (Curtis Mayfield), « Chain of Fools » (Aretha Franklin) ou à cette version carrément groove de « Love for Sale » (Cole Porter) ! Fin du 1° set, suivi des 2° et 3° qui enfonceront un peu plus leurs flèches dans nos cœurs de soul groove freaks, avec des brûlots qui ont eux aussi bâti l’histoire incroyable de la musique américaine. Que voulez-vous, quand on vous offre presque à la queue leu-leu « The World is a ghetto » (War), « Trouble Man » (Marvin Gaye), d’autres morceaux de Curtis Mayfield, et même du Earth Wind and Fire et du Ray Charles, vous vous dites que vous avez bien eu raison de ne pas aller à la plage ce jour-là, pour ronger votre frein au retour dans d’interminables files de voitures ! En plus, n’oublions surtout pas de décerner une mention spéciale aux reprises très « connoisseur » de hits magiques du grand Roy Ayers, l’un des papes du groove, dont on a pu se régaler de « Look to the sky », « Let me love you » et « Searching ». Irrésistible ! Et pour cadeau de fin de concert, sachez qu’on nous a aussi offert « Autumn leaves » version Rachelle Ferrell, « Simply beautiful » (Al Green), « Master blaster (jammin) » (Stevie Wonder) et « I got a woman » (Ray Charles) !

C’est fou ! Que dire de plus sur ce concert ? Un grand bravo ! Merci au Molly Malones et à ce groupe, quasiment une « Family affair » (on pense au titre de Sly and The Family Stone), pas si random que ça, mais très soul, hip, jazz et viscéralement groove ! Espérons le revoir un jour !

Par Dom Imonk,
Photos Solange Lemoine