« Darling Mind« 

Je viens de chroniquer une grande formation en délire et me voici à le faire pour une autre en contrastes marqués avec la précédente. Contestataire, libertaire, marmite infernale pour la précédente, papier glacé pour celle-ci. C’est un peu comme si nous passions d’un Jackson Pollock tout en jets à un Edward Hopper tout en «nature» effacée ! 

Nous nous expliquons.

Il nous semble que nous sommes en présence d’une oeuvre concluant un cycle d’études ou concourant à l’obtention d’un Doctorat. De belle facture, l’album s’écoute sans bousculer nos acquis. Très bien écrit académiquement, les compositions semblent répondre à un cahier des charges ou à un standard de formation (certes, très typée états-unienne). Les musiciens, connus pour certains, sont excellents et interprètent cette partition en prenant un soin particulièrement audible à ne pas la déborder, à ne pas l’entacher.

L’intérêt d’une tel album et de son enregistrement, ne se doit-il pas de converger vers deux axes majeurs : innovation et originalité ? 

Composition-innovation-originalité-combinatoire instrumentale variée et inattendue, engage pleinement la direction d’un large orchestra tel que nous l’on démontré Carla Bley, Maria Schneider, et aujourd’hui Snarky Puppies, Le Sacre du Tympan de Fred Pallem, etc.

Un premier disque fort prometteur d’une carrière à venir, tout en espérant le dépassement du convenu dans l’écriture, le déploiement d’un imaginaire vers des espaces plus exploratoires, plus en folie(s), assurément.

Il faut saluer ici le renouvellement générationnel des femmes compositeures et cheffe d’orchestre de Jazz car elles ne sont guère nombreuses.

Cela pose également la question des métiers : en France, le compositeur est davantage reconnu que l’arrangeur (métier n’existant d’ailleurs pas en tant que tel). Aux états-Unis par contre, l’arrangeur est un métier reconnu à un plus haut degré que le compositeur en soi (dans l’acception européenne s’entend), les compositeurs sont à l’Université et les arrangeurs dans l’industrie musicale. Pourquoi ? Car l’arrangeur est un métier concret à objectif professionnel de portée industrielle précise dans le monde états-unien.

Nous pensons que certaines pièces de l’album pourront être d’excellents outils pédagogiques pour les grandes formations de Jazz en conservatoire.

Cet album viendra agréablement compléter votre CDthèque et vous donnera l’envie de réécouter les pionnières citées ci-dessus, voire de découvrir d’autres femmes compositeures et/ou cheffe d’orchestre de Jazz plus actuelles que sont Kathrine Windfeld (Big Band – Orca) ou bien encore en France Carine Bonnefoy.

Patrick Defossez