Les couleurs d’ici (Live)

[COUP DE COEUR] Non je n’aime pas Marc Berthoumieux, mieux, je l’adore. L’album « Couleurs d’ici Live » est à l’image de son compositeur, généreux, sensible et d’une grande musicalité. Après la sortie de son premier album « les couleurs d’ici » en 1998, Marc Berthoumieux enregistre ce projet dans sa Haute-Savoie natale avec une partie de l’équipe qui a réalisé ce tout premier projet : Stéphane Guillaume au saxophone, Louis Winsberg à la guitare William Lecomte au clavier, Linley Marthe à la basse et Stéphane Huchard à la batterie. Ce quintette de luxe est rejoint sur cet enregistrement par des invités insolites. Se jouant de toutes les convenances jazzistiques, Berthoumieux invite à la fête Cat’Sax, un quatuor de saxophones local et familial, avec lequel il interprète « Balakatun » rendu célèbre depuis dans le monde entier par le bassiste Richard Bona. Il met aussi à l’honneur l’harmonie municipale d’Annemasse dans le titre à trois temps « Carnavalse » ; synthèse entre la valse musette et la musique des carrousels de l’enfance des plus anciens d’entre nous, ce petit air d’autrefois sonne vrai. On y est, c’est jour de fête au village. Voilà plus de 20 ans donc que cette pépite dormait au fond d’un gisement mis à jour depuis. Marc Berthoumieux a enregistré 5 albums entre temps, prouvant si c’était nécessaire, que l’accordéon est bien plus qu’un piano à bretelles. Au fil des 9 compositions interprétées sur scène sans mastering, on mesure tout le talent d’écriture et d’arrangement de ce très grand compositeur révélé au grand public par ses apparitions auprès de Nougaro sur l’album posthume « la note bleue ». De « bal du temple », à « Amazone » en passant par les rythmes sud-américains de « Victoria » ou encore ceux plus andalous de « Sevilla », Marc et ses complices donnent à entendre une œuvre de jeunesse mais une œuvre magistrale. C’est non seulement de la belle musique aux harmonies et aux rythmes savants mais c’est surtout la parfaite harmonie entre le chant des notes que l’on peut siffloter et la plus aboutie des techniques musicales, capable d’enchanter à la fois l’amateur pointu de jazz et le novice curieux. Le talent n’attendant pas le nombre des années, les trentenaires d’alors s’envoient comme des fous. Louis Winsberg et sa guitare aux accents sévillans maîtrise aussi bien là rythmique que les sons fusion et le vocoder. Stéphane Guillaume au saxophone alto et soprano distille des notes qui dégoulinent aussi facilement qu’un verre de rosé frais un soir d’été (à boire avec Maud et Ration, comme toujours). Linley Marthe à la basse et Stéphane Huchard à la batterie tiennent une rythmique impeccable, précise, technique et fine à la fois. Quant à William Lecomte, certainement le moins connu des cinq malgré ses nombreuses participations auprès de grands noms tels que Kirk Whalum, Anne Ducros, Claude Nougaro, Juliette et Jean-Luc Ponty, il nous livre une partie de claviers en parfaite résonance avec les mélodies originales du compositeur. À l’époque Marc attendait certainement une reconnaissance de son talent précoce pour la musique, mais accompagné par un instrument dont l’héritage populaire était peut-être lourd à porter. Il avait pourtant reçu les hommages de ses plus grands admirateurs, Marcel Azzola, gardien de la tradition populaire et Didier Lockwood, l’enfant terrible du jazz, de la fusion et de l’exploration. Plus de 20 ans après ce coup d’essai, nul doute ne subsiste tant ils sont nombreux à lui avoir fait confiance Nougaro, Aznavour, Bruel, Maurane, Bécaud, Julien Clerc côté chanson et aussi Youn Sun Nah, Texier, Ceccarelli et bien d’autres côté jazz. De la chanson française au néo musette comme dirait son collègue niçois Richard Galliano, Marc Berthoumieux a aujourd’hui toute l’admiration du métier et la longueur de sa biographie n’a d’égal que son talent. Alors écoutez, écoutez et écoutez-les encore ces mélodies, ces beaux accords remplis de joie, d’optimisme et de fantaisie qui vous feront oublier le gris, la pluie et vous emmèneront bien au-delà de toutes les frontières.

Par Vince

Sous la ville