Par Vince, photo Alain Pelletier

A l’occasion du 10e festival Jazz au Phare, Laurent Coulondre a accepté de répondre à quelques questions de Vince, le reporter intrépide, véritable Tintin du jazz, Milou en moins, bien entendu !

Présent pour la première fois dans l’île, il y a présenté mardi 6 août 2019 son nouveau projet hommage à Michel Petrucciani ‘‘Michel on my mind’’ en trio, 1 mois avant sa sortie officielle en CD, accompagné par Stéphane Huchard à la batterie (remplaçant DD Ceccarelli) et Jeremy Bruyere à la basse. Le lendemain mercredi 7 août, il accompagnait Sly Johnson sur cette même scène, avant de rejoindre un collectif plus étoffé pour une grande soirée hommage au pianiste disparu depuis 20 ans, sous le chapiteau de Jazz in Marciac cette fois.

A 20 minutes de sa montée sur scène, parfaitement détendu et souriant de toutes ses dents, comme à son habitude, il livre quelques confidences exclusives pour Action Jazz.

AJ : Première question très travaillée : ‘‘Horny Tonky’’ avec Nicolas Folmer, ‘’Shifters’’ avec Pierre de Bethman, ce soir avec Sly Johnson, impliqué demain à Marciac pour la soirée hommage à Michel Petrucciani… sans parler de tes projets solo (Gravity Zero, Michel on my mind…) mais qu’est ce qui fait jouer ou courir Laurent Coulondre ?

Laurent Coulondre : Je ne sais pas ! Ils m’aiment bien ! J’ai une spécialité, c’est que je ne suis pas cantonné qu’à un seul instrument. Quand tu es pianiste tu peux faire que du piano, que des claviers ou que de l’orgue. Moi j’ai tendance à ne pas choisir. Dans les projets cités, certains sont plutôt claviers, piano ou orgue, c’est ce qui crée un certain éclectisme et cet éclectisme crée plus de chances de jouer, pour moi. Au fur et à mesure… tu fais un truc, tu en fait un autre, on t’appelle, cela multiplie les rencontres et j’ai la chance de jouer avec plein de gens.

AJ : Hier sur scène tu disais que ton envie de jouer du piano remontait au disque de Michel Petrucciani dont tes parents t’avaient fait cadeau. Peux-tu nous faire ton autobiographie ?

Laurent Coulondre : J’ai commencé la musique par hasard à l’âge de 3 ans. Mes parents prenaient des cours de danse de salon tous les 15 jours et au lieu de me faire garder, je prenais des cours de batterie avec le mari de leur professeur de danse pendant ce temps. Cela a été un de mes premiers liens avec la musique, même si mon père et mon frère faisaient déjà du piano et du chant. Suite à cela je me suis inscrit à l’école de musique pour faire de la batterie jusqu’à 6 ans et je n’ai fait que cela jusqu’au jour où j’ai voulu essayer le piano. De 6 à 9 ans j’ai donc pris des cours de piano comme n’importe quel enfant qui veut faire de la musique, rien d’extraordinaire, mais j’aimais ça.

A 9 ans j’ai voulu faire d’autres instruments et notamment parce qu’il y avait des réductions de prix sur des instruments dans l’école de musique où j’allais à coté de Nîmes. Enfant j’étais un peu hyperactif, c’est d’ailleurs à cette époque où j’ai commencé le basket. Mes parents n’ont pas accepté que je saute une classe d’ailleurs, pour me laisser profiter de toutes ces activités pendant mon enfance. Je me rends compte que c’est cette période qui m’a amené à faire de la musique, mais jusqu’à 18 ans je n’avais pas décidé de devenir musicien. Je suivais mes études, j’avais d’assez bons résultats scolaires, j’ai passé mon bac S, et puis il a fallu réfléchir. Qu’est-ce qu’on fait ? A la base je voulais être dans le basket et puis je me suis rendu que je n’avais pas tous les atouts et qu’il me faudrait arrêter la musique pour me consacrer au basket ou inversement et j’ai donc choisi l’inverse, notamment à cause des mains. Au basket on se fait assez mal aux mains, donc j’en ai parlé à mes professeurs de sport, de mon désir de travailler dans le sport, de faire STAPS, de devenir préparateur psychologique de sportifs de haut niveau. Au moins trois, quatre profs de sports me l’ont déconseillé, car ils ne voyaient pas assez de débouchés dans cette filière. Et un peu déçu, je me suis dit si je ne fais pas de carrière dans le sport je vais faire de la musique. Alors je fouille sur internet pour trouver une formation et j’en trouve une au Mirail à Toulouse (université Toulouse II), musicologie Jazz, ce qui est unique en France, c’est à dire la fac, mais avec des cours de jazz et je me suis dit, ça c’est pour moi ! Du coup, j’ai dit, je ne fais pas du sport, je tente ça 

Je tente la fac et le concours d’entrée du conservatoire, je suis accepté dans les deux à Toulouse où j’ai passé une licence et le prix du conservatoire, puis je suis parti une année en Erasmus à Barcelone à l’ESMUC (le conservatoire supérieur de Catalogne). De retour en France, j’ai poursuivi en master et décroché au même moment le poste de direction d’une école de musique qui se montait à Toulouse. A cette époque je commençais pas mal à jouer. Pendant un an j’ai été responsable pédagogique, j’ai recruté une équipe de professeurs, ce qui fut très enrichissant. Jouant de plus en plus, je montais régulièrement à Paris et j’ai donc fini par arrêter les études l’année suivante, pour m’y installer. Free lance, jam session tous les soirs, couché à 5 heures du matin pendant 6 ou 7 mois. On rencontre des gens qui vous font rencontrer d’autres gens… c’est toujours comme ça. Y’a des soirs on n’a pas envie d’y aller, pas envie de bouger et pourtant ce métier c’est ça, le bouche à oreille… alors parfois faut vraiment se forcer pour sortir. On en a marre, de temps en temps, on a envie de rester à la maison à bosser son instrument. Tout s’est fait ainsi, un peu petit à petit et j’ai aussi participé à pas mal de concours. Je me suis dit que c’était une bonne voie pour se faire connaître et pour faire connaitre la musique que j’écrivais.

AJ : Et tout ceci en combien de temps… ?

Laurent Coulondre : J’ai 30 ans maintenant. Cela fait donc 12 ans entre le choix et aujourd’hui, mais tout s’est accéléré depuis 4 à 5 ans avec les Victoires de la Musique avec les concours de la Défense, de Lagardère, les talents jazz ADAMI, la génération Spédidam, les autoproductions Sacem, ça booste et cela aide financièrement à produire et à faire connaitre les disques. ‘‘Michel’’ (on my mind) c’est le premier sous mon label New World Production, et on est très contents. Ce sont aussi mes parents qui m’aident pour ce label.

AJ : Au final, Laurent Coulondre… acoustique, électrique ou éclectique ?

Laurent Coulondre : J’ai toujours du mal. En ce moment c’est pas mal acoustique, Ce soir c’est claviers électriques ; je joue debout cela n’a rien à voir avec hier mais j’adore (rires) Je n’arrive pas à choisir, je suis éclectique électrique acoustique ! (rires encore)

AJ : Une info exclusive pour les lecteurs d’Action Jazz et les fans de Laurent Coulondre ?

Laurent Coulondre : Mon projet est de faire une suite à Gravity Zero, mais plus musclée. Être plus nombreux, un truc pour la scène à faire paraitre d’ici un an pour laisser le temps à ce disque (Michel on my mind) d’exister. J’ai envie d’un truc un peu musclé avec des lights et plus de monde sur scène, un show plus travaillé tout en gardant de l’impro et de la spontanéité et d’aller plus loin dans le visuel. J’ai envie d’avoir des copains avec moi.

AJ : Merci Laurent pour ta disponibilité. A très vite.

Je libère Laurent qui n’a que quelques minutes avant de rejoindre la scène pour une performance ébouriffante avec le groupe de jeunes musiciens qui accompagnent Sly Johnson.