Round the world

L’américaine Jana Herzen est la fondatrice de la maison de disque Motema Music à Harlem, spécialisée dans le jazz et les musiques du monde. Il se trouve qu’elle est aussi, auteur-compositeur-interprète, très influencée par les musiques folk, rock et jazz. Parmi les artistes de son label, on peut citer Gregory Porter, Monty Alexander, Kellylee Evans, Randy Weston, Jean-Michel Pilc et un certain Charnett Moffett. Bien moins connue dans la « jazzosphère » que ce remarquable contrebassiste, fils du légendaire percussionniste Charles Moffett (qui s’illustra auprès d’Ornette Coleman), Jana Herzen s’offre ici un projet intitulé « Round the world » où l’ambiance oscille entre folk et jazz. Au travers de cinq compositions originales et de standards qu’elle s’approprie avec un grand naturel, Jana Herzen crée une ambiance douce qui vous cocoone près d’une cheminée qui crépite, avec un verre de vin (à consommer avec Maud et Ration, ou quelqu’un de votre choix !), un chat qui ronronne et un bon bouquin. Ici, le gros matou s’appelle Charnett Moffett dont la basse fretless offre une coloration tout en nuances et en subtilités ; il met parfaitement en valeur la voix de Jana pour créer un subtil mélange de rêveries, sophistiquées, sur des ballades élégantes et originales.

On ne peut s’empêcher de penser à Joni Mitchell sur cet album ; la reprise de la canadienne iconique des 70’s « Both sides now » n’est certainement pas un hasard. Les autres « covers » sont plus ou moins éloignées de ce registre, en commençant par le magnifique « Blackbird » des Beatles, puis le duo baguenaude sur un air des rockers australiens de Men at Work en passant par le mythique « Killing me softly » de Roberta Flack. Le grand écart des influences, fut récemment remarqué par le vénérable People Magazine qui a commenté le projet ainsi : « Le riche passé de Herzen imprègne son travail de couleur et de caractère. »

Les titres originaux composés et arrangés par Jana Herzen, viennent ponctuer sans contraste, la douce complicité des deux partenaires de jeu. Chacun met l’autre en valeur dans une relative sobriété qui fait mieux encore ressortir, tour à tour, les phrases musicales et les petits effets de style de la basse ou de la guitare. Mes deux compos coup de cœur, « on the outside », « far away » font le pont entre la douce nostalgie de ce style folk des années 70 un brin désuet et une écriture plus contemporaine, mijotant ainsi une recette avec laquelle toutes les générations peuvent se régaler.

Malgré le soin des arrangements et la précision du jeu, ce ne sont pas les performances vocales ou instrumentales qui séduisent dans cet album mais davantage l’émotion d’une sincérité palpable qui s’en dégage. Jona Herzen ne se prend pas pour une chanteuse elle chante tout simplement avec son cœur.

Par Vince

Motema Music