Flash Pig – The Mood For Love

Pépite 5 étoiles

Adrien SANCHEZ : Saxophone

Maxime Sanchez : Piano

Florent Nisse : Contrebasse

Gautier Garrigue : Batterie

Le quartet Flash Pig a encore frappé le mois dernier en sortant son cinquième album : « The Mood Foor Love ». ActionJazz avait été particulièrement élogieux pour leur disque précédent en 2022 : « Le plus longtemps possible » et lors d’un concert à Bordeaux en Avril 2023 au « Blonde Vénus ». D’ailleurs le CD avait été un coup de cœur de l’académie Charles Cros et le groupe « Groupe de l’année 2022 » selon Jazz News et Jazz Magazine.

Nous retrouvons nos 4 musiciens sur un exercice nouveau : pas de compositions personnelles mais l’arrangement à 4, 2 ou 1 des musiques du film de Wong Kar Waï sorti en 2000 : « In the Mood for Love » qu’ils revisitent et jouent avec la même fougue que leurs productions précédentes.

Pour illustrer l’histoire sans lendemain du film nous retrouvons bien sûr les soupirs et la nostalgie mais aussi la folie de ces quatre-là qui nous embarquent dans leur univers où l’histoire du jazz côtoie leur façon très personnelle, très libre où chacun s’exprime tout en respectant les autres dans un jeu collectif réjouissant qui fait que l’on reconnait leur pâte !

Mes morceaux préférés :

Tout d’abord, comment ne pas admirer les 4 propositions du « Yumeji’s theme » dans leurs différents arrangements :

  • Une première proposition relativement « classique » arrangée par l’ensemble du quartet : un long leitmotiv lancinant au saxo traverse toute la plage sur lequel se développe doucement, en surimpression, la mélodie entrainée par l’habile Maxime Sanchez au piano. Viennent s’y faufiler les volutes du saxo d’Adrien après un beau duo contrebasse/piano. Le jeu est à la fois « classique » et inventif.
  • Puis une première variation concoctée par Florent Nisse place la contrebasse au centre : serrée, profonde, sentimentale puis le saxo lance des soupirs déchirants espacés, la batterie caresse, le piano scande quelques notes avant un jeu collectif d’une grande liberté.
  • Sur la deuxième variation arrangée par Maxime et Adrien Sanchez le saxo free délire rapidement à l’entame puis doucement dialogue avec le piano (1 seule note scandée) sur laquelle ondoie le saxo puis tous sur le thème en boucle généré par le saxo affolé, Gautier Garrigue proposant une palette infinie aux tambours, cymbales, baguettes et autres instruments de bruitage (quel talent !)
  • Quant à la troisième variation, arrangement signé Adrien, le saxo revient en solo au début sur des phrasés courts envoyés vivement dans l’espace avec impertinence, puis tous les 4 se déchainent en « free style » !

Quelle ingéniosité et quelle maestria déployées, c’est osé et réussi de faire cohabiter ces 4 versions sur un même album !

« In the Mood for Love » : Arrangement de Maxime : Sentimental Mood pour ce thème central du film, le piano déroule longuement la mélodie sur une rythmique bien dosée (valse lente ?), le saxo enroule ses phrases harmoniques, sensibilité à fleur de peau.

« Qing Tan » : Arrangement de Maxime : A l’entame et au final les bruitages de Gautier et la façon d’envoyer les notes d’Adrien nous rappellent que nous sommes en Extrême-Orient. Entre les deux, le piano prend les rênes d’un développement collectif époustouflant.

« Quizas, Quizas, Quizas » : Ce boléro du cubain Osvaldo Farrès en 1947, chanté par Nat King Cole dans le film de Wong Kar Wai, mille fois repris sort lui aussi du lot grâce à l’alternance de passages joués de manière traditionnelle et des dérapages où les musiciens tordent le tempo, le saxo très en verve puis le piano magnifient le propos, la rythmique chaloupe.

« Age of bloom » : Disons quelques mots sur ce morceau au kitch assumé et amplifié avec humour, Gautier rend parfaitement le côté « marche militaire ». Puis le piano s’envole, la contrebasse arrime, la batterie vibrionne, le saxo revient sur le thème pour le final !

« Angkor Wat Theme » : arrangé par les 4 : Autre moment d’émotion : feeling intense de Florent à la contrebasse, non moins sensitif de Maxime au piano, souffles légers respirés par le saxo d’Adrien, batterie pudique et souple, le choeur de leurs voix rajoute de la profondeur, c’est magnifique !

Bref, la maturité va très bien à ces 4 musiciens majeurs sur la scène jazz française et européenne, espérons les revoir et re-écouter bientôt dans notre belle région.

Chronique de Martine Omiécinski

Label Astérie sortie le 02 Février 2024

https://www.facebook.com/FlashPigQuartet/