Pierre do Sameiro – da Parigi a Firenze

5 étoiles

Pierre do Sameiro : Saxophones ténor et soprano, compositions

Simone Basile : Guitare

Mattéo Anelli : Contrebasse

Giovanni Paolo Liguori : Batterie

Une histoire pas banale !

Comme aime à le rappeler Alex Dutilh animateur jazz sur France Musique, le musicien qui raconte une histoire (ou son histoire) a plus de chance de toucher le public et là, Pierre Do Sameiro nous raconte le parcours peu banal qui l’a mené à cet album et ses influences ou coups de cœur pas seulement musicaux : John Coltrane, mais aussi Jean Ferrat, ou encore Pier Paolo Pasolini et l’Italie.

Pierre Do Sameiro est né à Bruges en banlieue de Bordeaux, il a suivi des cours de saxophone classique au conservatoire de Bordeaux et en même temps s’est frotté aux musiques actuelles au début des années 2000 en jouant dans différents groupes de ska, punk et rock. A vingt ans, par soucis financier, il doit lâcher la musique pour des études techniques puis un métier qui l’amène à se déplacer à travers la France. Un jour, sur la route, en entendant John Coltrane jouer sur « Kind of Blue » de Miles Davis, il décide de plaquer son job pour revenir à la musique. Sur les conseils de copains saxophonistes bordelais il entre (après concours) au Centre des Musiques Didier Lockwood (CMDL) dont il sort diplômé en 2014 (ses profs de saxo : Stéphane Guillaume et André Villéger). Vient alors le temps des jam sessions parisiennes avec les copains d’école puis le partage de la scène avec des musiciens plus connus citons Olivier Themine, Simon Chivallon, Alexis Valet, Charley Rose, Ronald Baker, Yoni Zelnik ou encore Enzo Carniel. Ses pérégrinations l’amènent de Paris à Florence en Italie où il rencontre les talentueux musiciens avec qui il va partager cet album, il devient leader de l’Italian Quartet.

Cet album « Da Parigi a Firenze » est son premier disque à son nom. Il a été enregistré à Florence, la rencontre avec Simone, Mattéo et Giovanni Paolo ayant « matché » tout de suite ce qui donne le premier morceau de l’album : l’énergique « The Hang » suivent d’autres histoires en lien avec ses passions, ses admirations ou tout simplement la vie !

Mes morceaux préférés :

« Ma France » : Saluons le magnifique hommage que rend Pierre à un grand auteur, compositeur et interprète : Jean Ferrat, il a certainement écouté en boucle ses chansons (héritage des parents ?) lors de ses traversées en camion de l’hexagone. L’interprétation est poétique, émouvante, envoûtante, proposée avec beaucoup de « feeling » au saxo, ses 3 compères l’entourant d’un écrin de velours.

« P.P.P. » pour Pier Paolo Pasolini : Un autre coup de cœur de Pierre, ce cinéaste a pour lui le don d’évoquer simplement et avec beaucoup de vérité « les gens ordinaires » comme dans « Mamma Roma ». C’était aussi quelqu’un d’affranchi qui débordait du cadre comme le fait Pierre sur cette plage avec la fougue et la liberté d’un John Coltrane (grâce à l’écoute de qui il est revenu à la musique comme dit plus haut) traduites en arabesques multiples. Quant à Simone Basile il est particulièrement inspiré sur ce morceau. Le retour final collectif sur le thème tout en scansions est aussi réussi.

« Red Castle » : Sur quelques accords Mattéo Anelli entame en boucle avec un beau son grave puis le saxo et la guitare mélangent suavement leurs harmonies, suit un beau dialogue contrebasse/guitare puis Pierre volute sur un chorus que n’aurait pas renié Olivier Themine avec qui il a perfectionné son jeu (A Chateau rouge chez Olivier). Giovanni Paolo Liguori brille par ses mesures superbement dosées, le saxo devient déchirant, c’est un vrai régal !

« Song for Jessica » : Pierre nous embarque dans les airs avec son soprano et sa gracieuse mélodie, Mattéo ancre en terre comme un vigile de la rythmique.

« Solego » : Longue Intro au saxo solo dont les ondoiements pourraient rappeler Sonny Rollins puis commence la douce ballade ou chacun flirte avec l’émotionnel, la très bonne prise de son permet de bien souligner le travail de chacun tout en magnifiant le collectif. Le saxo et la guitare se font lyriques.

« The Jack » : Scandé, rythmé, inventif de la part de tous, les lignes mélodiques de la guitare sublimant le sax free et volubile avec répétitions et scansions («scands ») à la Coltrane.

« Togliatti’s Blues » : La ryhtmique swingue, la guitare brille sur ce Bop/Blues où le ténor envoie en vrilles ses sons, chacun prend le solo de manière très expressive, c’est plein d’énergie, et bien dansant !

« Rinascimento » : Pour la frénésie, la joie collective et les solis sauvages et lumineux de chacun pour fêter ce renouveau et terminant en apothéose le premier album de Pierre revenu à la musique.

Bref, un album qui devient vite addictif ! Attendons impatiemment les « Live » à Bordeaux, en Nouvelle Aquitaine et bien sûr partout ailleurs, c’est ce qu’Action Jazz souhaite à Pierre Do Sameiro et à ses formidables acolytes italiens !

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https://www.facebook.com/pierre.dosameiro