Arnaud Dolmen et Leonardo Montana – « LéNo »

5 étoiles

Arnaud Dolmen : Batterie, glockenspiel, chœurs et composition

Leonardo Montana : Piano, chœurs et composition

Arnaud Dolmen est un batteur et compositeur d’origine guadeloupéenne très demandé sur la scène jazz et au-delà. Il a reçu beaucoup de récompenses et de titres entre 2016 et 2022 de révélation à musicien de l’année par les Victoires du jazz ou par les magazines de jazz.

Il s’est produit aux côtés de Bojan Z, Alfredo Rodriguez, Mario Canonge, Naissam Jalal ou Laurent de Wilde pour ne citer qu’eux.

Il a un sens inné du rythme et des pulsations hérités de la Caraïbe qu’il cultive avec gourmandise en les actualisant sans cesse à sa sauce.

Leonardo Montana, d’origine brésilienne, est né à La Paz d’une mère anglaise et d’un père colombien, a grandi entre Bahia et la Guadeloupe, puis est devenu parisien d’adoption. On l’a découvert avec la batteuse Anne Pacéo, le saxophoniste cubain Irving Acao ou le maître de la contrebasse cubain Felipe Cabrera (qui dit de lui « si je naissais à nouveau je jouerais uniquement avec lui » !). Leonardo a été profondément frappé lors de sa jeunesse par le rythme « gwoka » de Guadeloupe (qu’Arnaud maîtrise bien) basé sur une série de tambours. Outre l’intégration de cette énergie, il est capable de beaucoup de poésie et d’incroyables improvisations.

Les deux sont amis de longue date, leur « association » est comme une évidence, une osmose, leur univers musical est plein d’audace, de générosité. Ils nous embarquent dans un voyage unique dans lequel nous avons bien du mal à croire que seulement un duo piano/batterie est entre nos oreilles tant ce que nous entendons est riche !

Mes morceaux préférés :

« Les Invisibles » Part 1 Composition des deux : Leonardo démarre en douceur au piano, Arnaud suit avec quelques bruitages de graines roulées puis les deux envoient très vivement, très percussif, tambour battant au sens propre par Arnaud puis viennent leurs voix en chœur guadeloupéen, puis de nouveau le piano lyrique et le bruitage doux : voyage vers l’ailleurs assuré !

« Les invisibles » Part 2 : La célèbre composition du percussionniste cubain Mongo Santamaria « Afro-Blue » est ici très arrangée ! Les riffs de piano de Leonardo sont terribles, ses boucles également, ça bouge, ça ondule, c’est flamboyant, quant aux percus et clochettes au glockenspiel étonnantes !

« Agora Sim » : Composition de Leonardo alternant les passages où batterie et piano saccadent la cadence avec énergie et brio puis calme après la tempête : changement de tempo pour dérouler la poésie puis de longues improvisations créatives et réjouissantes de chacun nous renversent.

« Romance de La Luna Tucumana » de Pedro Aznar : Pour cette ballade latine du bassiste et compositeur argentin, le piano mélodieux déroule en douceur et Arnaud frappe très légèrement le tambour en boucle accompagné des balais non moins aériens, quelques élans plus percussifs viennent ponctuer le tout avec des chœurs au final, c’est très beau !

« Zouky Monky » : Quelques notes « d’Evidence » de Thelonious Monk jazzent sur le piano, mâtinées par Arnaud avec la puissance de son zouk au rythme implacable et joyeux : quelle « fusion » passionnante ! Quelques chœurs, des impros brillantes, l’impression d’avoir un groupe entier ! Saluons au passage la prise de son magistrale qui y est aussi pour quelque chose !

« Léno » : Composition d’Arnaud et titre de l’album. Le tempo est chaloupé, le piano est aussi à la rythmique, Arnaud tout en légèreté avec la jazette (la plus petite baguette) nous fait un festival de cymbales et de fûts, Leonardo enroule la mélodie en boucles puis déroule joliment, les deux en osmose totale finissent à fond ce beau thème.

Entre ces morceaux, 4 compositions « Spirales » 1,2,3 et 4 jalonnent l’album ni tout à fait les mêmes, ni tout à fait une autre, comme un éternel recommencement avec une sensation d’apaisement entre le 1 frénétique et le 4 plus zen !

Bref un travail passionnant entre ces deux musiciens qui ont tant de choses à partager pour notre plus grand plaisir ! A quand un « Live » dans notre région Nouvelle Aquitaine ?

Quai Son Records et Samana Production sortie le 29 mars 2024

Chronique de Martine Omiécinski le 18 Avril 2024

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