Kamasi Washington « Fearless movement Europe Tour » – 28 mars 2025 – Le Rocher de Palmer
15 15 en 1° partie

Kamasi Washington, sax ténor
Rickey Washington, sax soprano, flûte traversière
Ryan Porter, trombone
Cameron Graves, piano
Tony Austin, batterie
DJ Battlecat, platines, percussion
Joshua Crumly, guitare basse, contrebasse
Patrice Quinn, voix
Le piano déjà hypnotique envoie cette musique logorrhée, la batterie tonitruante bat la chamade, trombone et sax avancent frontalement, engagent la musique vers une passion puissante. La tendresse du sax de Kamasi Washington s’y glisse par endroits, sculpture travaillée, tête chercheuse. Le piano ponctue pendant que la batterie de Tony Austin envoie, poumon insolent, insatiable, assoiffé de vitesse, permettant ainsi à Kamasi de faire s’envoler son sax. Contrebasse et percus ne sont jamais en reste, aériennes et nerveuses en même temps. Kamasi attaque, creuse, déploie, appuie, insiste comme on espère d’un saxophoniste, obstination de la création, insatisfaction. Déborder, extraire, transformer ! Un alchimiste.
Faut que ça exulte, que l’art explose, dépasse, mettre hors de, au-delà, jusqu’au dernier son irradié, irradiant.
Le piano prend des teintes psychédéliques, multipliant les effets pour amener la transe, la batterie ne cesse de rouler. Retour du trombone, la voix de Patrice Quinn et l’électro s’y ajoutent, reprise des percus. Le sax de Kamasi Washington et le trombone de Ryan Porter entament un chant solennel pris dans le tourbillon des autres musiciens. C’est ainsi que l’on entre en transe, comme une communion à entreprendre si on le veut bien.
Kamasi le modeste dit être parti de quelques notes répétitives jouées au piano par sa fille. En émerge une musique pleine, absorbant tout l’espace. Le père de Kamasi, Rickey Washington, en libère un solo au sax soprano, fin, lumineux, au chant riche, sons aigus, effleurés, appuyés, frétillements délicats, basse de Joshua Crumly et percus le soutenant. Kamasi reprend les notes bénies et les fait danser avec tant de virtuosité qu’un swing carthatique prend forme. La musique tourbillonne à nouveau, les instruments se mêlent, se croisent, se marient, quelle folie fabuleuse ! Kamasi groove, empêche le son de s’épuiser, le transcende sans cesse.
Le DJ Battlecat percussionnise, divise, dédouble un vinyle, réponse hystérique, tempo frénétique à à la maîtrise pourtant impeccable, il cherche la profondeur du tempo, la scansion, son envoûtement dont le sax et le trombone se saisissent à nouveau pour que tout fasse musique. La turbulence de la vie à hauteur de musique.
A nouveau l’électro, des ondes, électrons nerveux, se répandent dans la salle, la musique est pulsion et atmosphère, Kamasi est aussi au clavier pour nous faire rentrer dans sa stratosphère, le clavier de Cameron Graves ne cesse de courir, la trame est constamment remplie. L’air ambiant doit être constellé de myriades de notes, points colorés, brillants de leurs mille feux joyeux. Une féerie ! La guitare basse appuie comme il le faut, au tour de la batterie de développer cette énergie puissante.
Les mots de Kamasi sur l’amour que nous devons nous porter les uns les autres résonnent en cette période haineuse. Une introduction pour la chanteuse immédiatement suivie par le sax et le trombone. Le moment est venu pour le solo de basse très doux, aux cordes caressées pour en extirper quelques douceurs. Le piano arrive en filigrane permettant à la basse d’accentuer son groove. La voix peut reprendre sa place, plus chaloupée, mais juste au bord des instruments. La flûte traversière du papa, complice.
Le DJ fait rapper les vinyles. C’est une fête en soi. Faire déraper les morceaux et recréer du groove, fracturer le son, le dupliquer, belle matière pour appeler un trombone et un sax, gourmands, gourmets.
Kamasi commence toujours au clavier par un swing très pulsionnel ; c’est ce qu’ils vont en faire qui compte. Partir de bribes et tisser un imaginaire musical plein de force, d’une sensualité puissante. Le piano de Cameron Graves pour ce faire ruisselle avec dextérité. La batterie et les percus maintiennent le pouls élevé, Patrice Quinn peut alors offrir un chant de rosée du matin, les deux claviers sont autant de petites vagues infinies. La batterie frénétique de Tony Austin, le sax de Kamasi s’enroulent dans cette atmosphère ouatée. Pourtant très vite, la montée en puissance reprend ses droits, la beauté du son, ses espérances, doivent émerger.
Un morceau pour l’amour fait d’amour, voire pour faire l’amour raconté par un trombone soft, remarquablement entouré de la basse et de la batterie. Le DJ percussionniste souffle dans un bec au son pincé et aquatique. Restons ainsi immergés, balancés au gré de leur musique enivrante. Together, chante-t-elle. Together. O yeah…
Pour terminer, Astor Piazzola est passé au kaléidoscope. Des figures se déplacent alors, changeant de formes, de couleurs, Kamasi s’y promène, flirte avec la composition du morceau, la possibilité de s’emparer de la cadence, de la faire tournoyer, de l’entêter, de l’étourdir puis ils retournent tous à l’hommage. Soit dit en passant, magnifiques débordements du piano de Cameron Graves. Ils terminent tous comme souvent en fanfare tempétueuse.

Par Anne Maurellet, photos David Bert
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